« Changer les âmes
Changer les cœurs
Avec des bouquets de fleurs
La guerre au vent
L'amour devant
Grâce à des fleurs des champs »
(Laurent Voulzy et Alain Souchon sont sans aucun doute mes poètes modernes préférés, j’y reviendrai peut être)
… Bref, il y a trois mois je me suis fait tatouer.
Intriguée depuis quelques années, je ne voyais toujours pas de projet se dessiner concrètement, j’avais donc laissé cette envie en suspend.
Et puis pendant le confinement, tout s’est décidé clairement : où, qui, quoi, pourquoi, quand, comment !
D’abord, et après avoir vu plusieurs témoignages sur des personnes tatouées, j’en étais arrivée à la conclusion que j’aimerais avoir une pièce d’un artiste dont j’aime le travail et l’univers, et pas demander une reproduction de quelque chose.
J’avais déjà depuis longtemps l’idée de l’emplacement pour mon premier tatouage, sur la tranche du bras, quelque chose que les gens voient mais que moi je ne vois pas tout le temps.
Je suis sur YouTube depuis plusieurs années une créatrice de contenu qui m’inspire beaucoup et qui se nomme Coline (et sa chaîne Et pourquoi pas Coline).Je me souviens d’une vidéo où elle présente son dernier tatouage (une guirlande de fleurs en dessous des clavicules), et j’ai instantanément un coup de coeur pour cette pièce. Je me renseigne sur l’artiste, Armelle, et je constate que l’ensemble de son univers fleuri me plaît énormément. J’apprends plus tard que des copines se sont déjà fait tatouer par elle, ce n’est pas tout à fait une inconnue :)
Vous l’avez compris, j’avais donc déjà le qui, et le quoi (des fleurs).
Cette symbolique est tombée sous le sens, c’était la parfaite illustration, signification que je voulais lui donner : une guirlande de fleurs qui éclosent. Sa poésie implicite. Son pouvoir doux et fort à la fois.
Le déclic, il a eu lieu grâce à mon cheminement personnel, grâce au temps que je me suis offert, grâce au bonheur nouveau que j’avais trouvé en embrassant enfin toute la palette qui compose mon être. Je pense ne jamais m’être sentie aussi vivante pendant le confinement. Alors à sa fin j’ai décidé de me faire tatouer pour de bon et pour plein de bonnes raisons.
La première elle est bien sûr thérapeutique : et ça m’amène à la question du quand. Je voulais honorer cette année de lutte intense suite à ma crise d’angoisse, crise de tétanie où j’ai eu très peur de mourir (le principe d'une crise d'angoisse quoi). Ces années passées où je ne me suis pas autorisée à m’écouter. Je voulais marquer symboliquement ce tournant et surtout je voulais remercier mon corps. Son incroyable capacité à se reconstruire et lui rappeler à jamais ce pouvoir de résilience.
Il était primordial pour moi de lui dire : ok, tu vois, j’ai confiance en toi.
La deuxième et qui complète la première c’était aussi de casser ce cycle épuisant de prévoir chaque mois rentrée de septembre depuis plusieurs années et en particulier les années de concours, qui n’était qu’une source intense de stresse. Je voulais que cette année - et encore plus dans le contexte actuel où l’avenir est peu certain- le mois de septembre soit positif, synonyme d’un acte de renaissance, de concrétisation de mon « éclosion ».
Enfin j’avais sérieusement envie de détacher cette première image qui je trouve me colle un peu trop à la peau de fille gentille sage et lisse.
Le processus a lui aussi été un cheminement, de la joie d’avoir un rendez-vous dès septembre - alors que beaucoup de tatoueurs avaient déjà boucler leur agenda de l'année, puis la réalisation de ce que cela impliquait, affiner le projet, et ça j’en dois une fière chandelle à mon amie Clélia, qui a su m’aider à définir les détails, qui m’a joliment gribouiller sur le bras au khôl, qui m'a commandé des pochoirs éphémères de Armelle pour m’habituer, Merci. J’ai adoré que tu m’accompagnes dans ce projet si personnel.
Plus le rendez-vous se rapprochait, moins je réalisais, je n’appréhendais pas vraiment. Ce qui m’en vient à vous parler du comment: Le comment, c’était de ne rien dire à ma famille, enfin, aux personnes de la génération de mes parents. Je voulais embrasser toute la liberté de ma décision, car c’était la mienne, et elle n’appartenait qu’à moi. Un acte de petite rébellion en somme, surtout contre le mal qui m’avait rongé depuis longtemps, c’est à dire de trop écouter l’avis des autres, sollicité ou non.
Alors le Jour J, il n’y eut place à aucune hésitation, mais à une sincère excitation. J’ai rencontré Armelle, très gentille, qui s’est inspirée en live de ma combishort pour créer le motif. Cette pièce n’existe que sur moi donc. En une heure c’était plié ! J'étais tellement ravie en sortant !
Alors, les semaines qui ont suivi ont été comme une nouvelle rencontre avec une partie de mon corps, je m’émerveillais, je m’inquiétais, je l’adorais.
Mon chéri s’est gentiment prêté au jeu à chaque fois que je lui disais, semaine après semaine « hey, regarde, j’ai un tatouage ! ».
J’ai particulièrement adoré la réaction de mes collègues qui avaient bien compris ma démarche et m’ont dit unanimement « Ce tatouage, c’est toi ».
Aujourd’hui, je peux dire l’avoir tout à fait apprivoisé, je n’y pense plus tout le temps, je me surprends à m’émerveiller quand on le voit apparaître quand mes manches sont retroussées. Je me dis que si je n’y pense plus c’est bien qu’il est parfaitement intégré comme une partie de moi désormais; et je me sens plus forte avec lui.